Directeur Général de la Fondation ITSRS, Vice-président de l’URIOPSS Ile-de-France, Chargé d’enseignement Master en Économie et Gestion des Structures Sanitaires et Médico-sociales à l’Université Paris Dauphine-PSL, Docteur en Sociologie et Économiste, Eric Marchandet revient avec nous sur les sujets d’actualité du monde du social.
Pour ce troisième numéro de « 3 questions à… », lumière sur Eric Marchandet, Directeur Général de la Fondation de l’Institut du travail social et des recherches sociales (ITSRS) – L’Institut régional du travail social (IRTS) d’Ile-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne.
L’Institut régional du travail social Île-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne a pour but la formation et le perfectionnement des travailleurs sociaux français ou étrangers et de leurs cadres (formation initiale ou continue), ainsi que les recherches en matière d’action sociale. Leur mission d’animation régionale, se traduit par des formations sur site. Deux sites de formation : Montrouge (92) et Neuilly-sur-Marne (93), contribuent à la qualification et à la promotion des professionnels et des personnels salariés (ou non) engagés dans les domaines de la lutte contre l’exclusion, la prévention ou la réparation des handicaps ou inadaptations ainsi que la promotion du développement social.
A l’IRTS (Institut Régional de Travail Social, ndlr.) Montrouge – Neuilly-sur-Marne, nous faisons face à une baisse tendancielle de notre recrutement depuis une dizaine d’années. A la fin des années 1990 – début 2000, un candidat sur 10 était sélectionné. Il s’agissait de candidats plus âgés, mieux formés, et qui connaissaient bien le métier. Nous faisions face à très peu d’abandons car ils savaient ce qu’ils voulaient faire.
Aujourd’hui, la tendance se résume à 1 candidat sélectionné sur 1,5. Il n’y a plus vraiment de sélection, juste une admission. Depuis, les épreuves écrites ont disparu, seul l’entretien oral subsiste. Conséquence : les associations et établissements en pâtissent.
Nous perdons environ 30% de nos élèves au cours de la formation. Ils abandonnent pour des motifs économiques ou pour des erreurs de parcours. C’est un public très jeune, avec parfois des problèmes de niveau, ce qui explique qu’ils ne vont pas au bout des 3 ans de formation.
Aussi, une fois diplômé, c’est un public qui bouge. L’offre est en faveur des salariés, ce qui fait que le recrutement est très concurrentiel entre les structures.
En résumé, nous avons des destins liés. Le manque d’attractivité des formations et des diplômes a un effet direct sur les structures.
D’abord, l’IRTS Montrouge – Neuilly-sur-Marne propose une double diplomation. En effet, si le Diplôme d’ État dispose d’un grade de Licence, il n’est pourtant pas disciplinaire. Il n’est ni automatique, ni prioritaire. C’est pourquoi nous avons mis en place une Licence Sciences de l’éducation – parcours travail social afin de faciliter la continuité de la formation, et ainsi d’accéder au Master.
Ensuite, depuis la Covid-19, nous avons mis en place des créneaux d’entretien avec une psychologue. Il faut dire que l’isolement, l’éloignement avec les familles, ou encore travailler exclusivement derrière un ordinateur n’ont pas fait du bien à nos élèves. Cette orientation psychologique existe toujours aujourd’hui pour accompagner les élèves dans leur quotidien qui n’est pas toujours simple, sur fond de précarité parfois…
Enfin, nous nous sommes penchés sur la numérisation des cours. Aujourd’hui, nous avons affaire à des générations très connectées, avec un rapport au monde différent. Suivre un cours descendant de 3h, c’est devenu compliqué, il a fallu que l’on réagisse pour nous adapter à l’évolution de notre public. Ainsi, nous avons formé un chargé de projets numérique qui s’occupe de la numérisation d’un certain nombre de formations.
D’ailleurs, nous avons mis en place un studio qui permet de créer des images, des interviews, des contenus audios, vidéos, pour permettre aux formateurs de scénariser leurs cours, et ainsi les rendre plus ludiques. Nous nous posons aussi la question de rendre les cours plus interactifs…
Nous essayons au maximum d’accompagner les étudiants sur le sujet. Nous avons affaire à des familles monoparentales par exemple, des jeunes éloignés de leurs parents, issus de milieux très modestes parfois. Nous nous adaptons à notre public et faisons en sorte de les aider.
Par exemple, depuis le début du mois de janvier, une assistante de service social accompagne les jeunes pour faciliter leur orientation à l’ouverture de droits. Nous avons créé un Bureau de vie des étudiants qui s’occupe de négocier des tarifs auprès des commerces situés autour de l’IRTS, nous proposons le repas du CROUS à 1€ aussi. Nous avons mis en place un placard solidaire pour que les jeunes puissent y trouver des vêtements de seconde main, des denrées alimentaires, etc. Nous réfléchissons notamment à un projet de maraichage avec des cours pour les aider à varier leur alimentation.
De façon générale, les étudiants en difficulté sociale vont aller vers l’apprentissage pour avoir un salaire. L’apprentissage devient un palliatif à la précarité.